Les coquelicots de sang de Rose Morvan

Retour sur un roman qui était dans ma wishlist depuis longtemps… J’adore la plume de Rose Morvan, toujours très juste et aux références historiques impeccables ! J’avais une barrière psychologique concernant ce roman, le sujet abordé certainement…

En effet, c’est la première guerre mondiale qui est explorée ici… Bien que j’aie déjà lu des romans se déroulant à cette époque, je ne savais pas si j’aurai le cran de m’y confronter à nouveau !

Rose Morvan nous plonge dans le quotidien d’Albertine Régnier, jeune femme médecin en plein conflit 14-18. Alors qu’elle prend la décision de rejoindre un hôpital de campagne proche de la 1^ère ligne de combat en février 1918, Albertine décide de tenir un journal où son quotidien de femme, de chirurgienne nous raconte la vie en cette période sombre.

De ses premiers jours au côté de Marie Curie aux « altercations » avec Fabien Desnoyers, médecin militaire responsable de l’hôpital de campagne, des épreuves endurées par les soldats aux considérations politiques et morales, Albertine nous offre une tranche de vie, émouvante parfois très dure mais tellement poignante !

J’ai adoré cette lecture ! Comme je vous le disais, j’appréhendais de me confronter à une lecture se déroulant en plein conflit…

Mais la plume de Rose Morvan a effacé mes craintes, une par une !

Par le biais de ce journal, tous les aspects de la société française sont évoqués : la guerre à proprement parler avec quelques détails sur les batailles que j’avais oublié, la vie dans les tranchées et les conditions si difficiles pour les soldats, mais également les « innovations » médicales, la vie loin du front et les impacts du conflit sur la société française… Le tout amené avec délicatesse ! Je me suis régalée de suivre le quotidien d’Albertine dont la vie est un combat ; pour s’affirmer en tant que femme à part entière, médecin qui plus est chirurgienne ! Elle est si moderne, si en avance sur son époque !

Au fil du récit, j’ai trouvé de l’amour, de l’espoir, des idéaux pour lesquels se battre ! J’ai souffert, mon cœur de midinette aurait tant voulu que les choses soient plus simples ! Mais la vie l’est-elle ? non, et surtout pas en cette période…

Cette période est méconnue de bon nombre de français et pourtant, si importante ! Je peux dire aujourd’hui que Rose Morvan m’a réconciliée ; non pas avec la guerre dit comme c’est ridicule, mais avec cette tranche d’histoire ! Je fais partie de ceux qui pensent que nous ne devons pas oublier pour ne pas recommencer les mêmes erreurs… Prendre conscience de tout ce qui s’est joué en cette période qui a tant changé notre société est primordial !

Pari réussi !

[Résumé : « Si j’ai entrepris d’écrire à partir de maintenant ce journal, c’est pour témoigner de notre difficulté à nous insérer dans ce monde d’hommes, surtout dans le domaine de la médecine où la méfiance à l’égard de notre sexe est tenace. Nos cerveaux, paraît-il, sont inaptes à concevoir la chose médicale. Ce présupposé nous maintient dans l’infériorité intellectuelle et nous enferme dans le gouffre de l’impossible crédibilité. Les plus virulents de nos adversaires y voient une altération, une aberration même de la nature, démontrant de manière tout à fait scientifique l’incompatibilité irréfragable d’être femme et médecin à la fois ! […]
Certains confrères et mes parents ne comprennent pas mon choix. « C’est trop dur pour une femme ! » Les infirmières y sont bien, elles ! Pourquoi pas moi ? J’ai le cœur bien accroché. J’ai conscience que je devrai m’imposer dans les hôpitaux militaires pour être crédible. Cela m’est égal, j’ai le sang vif et la détermination qui l’accompagne. Je ne laisserai personne me dicter ma conduite.
C’est ma façon de remplir mon devoir de femme, de citoyenne et de médecin. »]